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Friches

Walk in progress
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Démarche

Questions documentées


Si, au commencement était le mot, comment êtes-vous passé, dans votre projet, du mot à l’image ?

Textes et mots sont à l’origine de mon travail, ils sont porteurs d’images. Les images produites ultérieurement seront également porteuses de sens, comme  un discours indépendant. Il s’agit de dégager l’essence des mots (ou de leurs essences, comme on parle des arbres) afin que l’image soit le produit de cette recherche. Relever ce défi : c’est faire se lever le voile qui en couvre le mystère. Le mot et l’image sont enfants de la même mère : l’écriture, et du même père, le langage.
Comme le disait Mallarmé, la notion de « feux réciproques » précède ma démarche. Le verbe crée une image première, une image mère, que je convoque, que je scrute, que j’étudie, dans toutes ses couleurs, ses ombres et ses lumières afin de me l’expliquer et l’exposer au spectateur.


Quels sont les thèmes sur lesquels vous développez votre travail ?

Je recherche des territoires inconnus où peu à peu apparaissent des lignes de reconnaissance. C’est une longue alchimie. Je recherche l’incertitude liée au dépaysement.

Quel est votre parti pris lorsque s’ébauche l’esquisse de la peinture première ?

Le parti pris de la pauvreté, le pari d’élargissement de la conscience qui rejoignent mon expérience personnelle, sensorielle et intellectuelle.
J’esquisse un espace poétique en phase avec le monde qui nous fait face. Ce monde est inestimable, nous devons le regarder pour le voir. J’interroge la mémoire dormante et affirme, comme le dit Jacques Derrida : « voir, c’est voir ce que l’on ne voit pas ».


Comment s’articule le lien entre représentation abstraite et représentation figurative ?

Mon travail sur le lien entre la représentation abstraite et la représentation figurative s’articule comme une métaphore du visible. C’est un visible en mouvement, en devenir. Il n’échappe pas au temps, mais l’ouvre et propose que la trame du temps et de la mémoire s’y déroulent. Ce visible ouvre de nouveaux espaces que chacun interprètera selon son temps et sa mémoire.

Qu’attendez-vous que découvre le spectateur ?


Je souhaite qu’il ressente le processus de la montée du visible… des visibles, qu’il perçoive ce qui lie nature, peinture, ainsi que l’image des respirations entre ces deux mondes. Le visible va, à ce moment accueillir  en lui ce qui lui est étranger. Nous assistons à ce moment à un surgissement du réel.

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Au delà du regard, face à cette présence picturale, le visiteur va découvrir deux mouvements contradictoires, celui du devenir et celui du retour vers une origine constamment renouvelée.

Comment décrire ce dont vous voulez témoigner ?

La peinture propose ce qui ne peut se représenter, un insaisissable moment de l’écoulement temporel, un témoignage du passage et de la durée, comme une rétention future, un futur qui contient le passé. Cette notion de contre-sens temporel me séduit.
Pour moi, peindre, c’est laisser le monde se refléter : ce qui est peint apparaît plus réel.
Le paradoxe, n’est-ce pas l’image de l’invisible qui annonce le visible ?
Il s’agit d’un travail dans le temps, dans l’épaisseur du temps, derrière chaque image, il y en a une autre, plus proche. Le réel apparaît sous le voile symbolique.
Ces « paysages merveilleux »*, infiniment petits et infiniment grands permettent de concevoir la pratique du dessin comme un rituel mémoriel, ou d’appel, envers ces visages représentés, ces hommes, ces anonymes disparus dans la nature.


Qui êtes-vous ?

Un sédentaire qui aime voyager, un voyageur immobile qui travaille de manière longue et précise, à la fois ancestrale et inventée. La notion de temps est une constante dans ma vie. J’essaie de matérialiser la mémoire, celle d’un passé, souvenir, témoignage, trace ou empreinte, en constante transformation en y intégrant l’esprit et l’imagination.
Ce passé, bien que maîtrisé, précis et équilibré dérange car tout y remue : l’inquiétude, la joie et le sentiment de disparition.


Comment présentez-vous votre travail ?

Il existe un parcours qui pourrait bien constituer une clé, à moins que ce ne soit une énigme ajoutée à l’énigme, de telle façon que le visiteur perplexe se résolve à admettre qu’il est sous emprise d’une nature en mouvement dont il saisit la fugacité.






* merveilleux :


... la perte « vertigineuse » des repères devant l’instabilité de l’être mouvant, est le commencement de la philosophie. Il fallait noter surtout le retour incessant de «s’émerveiller» (thaumadzein), avec le substantif, l’adjectif et l’adverbe qui l’accompagnent, et la centralité de l’idée dans la pensée de l’ouvrage, où la charge positive du mot fait voir que l’émerveillement est la prise de conscience de l’inattendu, d’un phénomène étranger au cours normal des choses.

De l’émerveillement
Michael Edwards, professeur au Collège de France

 

 

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